(texte par l'abbé Joseph Veyron-Churlet d'après survol historique de St Etienne de St Geoirs "de la cité Delphinale au chef lieu des Ailes Dauphinoises)
Il y a un proverbe qui dit que les gens heureux n’ont pas d’histoire. Dans ce cas, St Michel de St Geoirs a du être un pays heureux, car il n’a pratiquement pas d’histoire, ou du moins celle-ci
nous est très peu connue. En particulier, nous ne possédons pas de livres historique, ni même de chronique sur son passé, et pourtant, la paroisse en est ancienne.
La raison, c’est que l’histoire de St Michel de St Geoirs se confond, en grande partie, avec celle de ses deux chefs-lieux consécutifs : St Geoirs et St Etienne de St Geoirs. A ce propos, je me
permets de renvoyer à ma plaquette : « survol historique de St Etienne de st Geoirs ».
Le premier chef-lieu a été, comme le nom l’indique : St Geoirs, dont le castrum ou château fort, remonte au début de la féodalité (10ème siècle).
Une mention en est faite au II e siècle dans le « cartulaire de St Hugues ». Et un acte important, le partage du Comté de Salmorenc (Sermorens) par le Pape Pascal II, met ce « castrum » et son
territoire sous la juridiction religieuse de l’Archevêque de Vienne.
A cette époque, St Geoirs est un mandement comprenant : le village primitif de St Etienne (la Domus Sti Stephani), St Michel, Plan, Quincieux, Sillans, et Izeaux. St Michel fait donc partie du
mandement de St Geoirs : il dépend du seigneur de ce lieu, et comme lui, du baron de Bressieux, puissant féodal dont l’autorité s’étend sur plusieurs mandements et de nombreux vassaux dans la
Bièvre et les Chambarands. Les seigneurs de Bressieux font partie des « quatre hauts Barons » du Dauphiné, et leur forteresse, dont subsistent deux tours, encore impressionnantes dans leurs
ruines, domine la région. Au Moyen-Âge, St Michel a un château fort, pitonné sur le côté nord « le Devais » qui surplombe le village et donne sur la plaine de la Bièvre. Sur le cadastre, figure
encore un lieu-dit « le château », sur son emplacement a été érigé, autour de 1950, une vierge au nom évocateur : Notre-Dame des Vents.
Là était, sans doute, le siège d’une « mestralie » - mentionnée au XIIIe siècle – c'est-à-dire d’une juridiction judiciaire, dépendant vraisemblablement du Sire de St Geoirs et du Baron de
Bressieux.
Les relations avec la puissance baronnie devaient être assez étroites, puisque le château de Bressieux avait une porte appelée « Porte St Michel » laquelle ouvrait sur le chemin dit de St
Michel.
La paroisse, nous l’avons signalé, est ancienne, car les lieux de culte sous le patronage de St Michel ont une origine lointaine.
A partir de 1314, un changement intervient pour tout le secteur. En effet, le Dauphin Jean II, après avoir racheté les droits du Baron de Bressieux et du Sire de St Geoirs (cf « survol historique
») crée la Ville Neuve de St Etienne de St Geoirs, et son mandement. Celui-ci comprend St Geoirs, St Michel, Plan et Quincieux.. Il fait construire le château de St Etienne avec son enceinte, et
y établit, pour le représenter, un châtelain. St Michel dépend donc de lui.
Sur le plan de l’administration interne, St Michel, comme les autres villages, a un consul désigné par les habitants. Mais les lien avec St Etienne sont étroits, le mandement formant une «
communauté » sous l’autorité du châtelain du chef-lieu.
Sur le plan religieux, St Michel est une paroisse, faisant partie de l’Archiprêtre de Bressieux, - - mais au 17e siècle, l’archiprêtre est le curé de St Etienne - et de l’Archevêché de
Vienne.
Ce régime durera jusqu’à la révolution, époque où St Michel, comme les autres villages, deviendra une commune, et en tant que paroisse, sera rattaché au diocèse de Grenoble, après la suppression
par le Concordat de 1801 du siège épiscopal de Vienne.
Au XIVe siècle, mention de la paroisse « Sti Michaêlis de Fayno ». Un peu plus tard, c’est « St Michel de Fayn » ou « du Fayne ». Cette dernière expression semble bien être une dérivation de « fagus », latin le hêtre. Même origine que le mot « fâine » désignant le fruit du hêtre ? Les coteaux de St Michel étaient très boisés, ils le sont encore passablement, et le hêtre, appelé dans notre région « fayard », est un arbre assez répandu. Cette appellation a été transformée au XVIIe et XVIIIe siècle en « St Michel La Faim » disons plutôt déformée, car St Michel ne semble pas avoir plus souffert de la faim qu’un autre pays. Nous trouvons aussi le nom de « St Michel de la Tour ». Peut-être en raison de la tour du château féodal qui se dressait au-dessus du village sur le coteau nord. La dernière appellation donnée à st Michel fut, sous la révolution, qui voulut supprimer les noms de saints, « Coteau du Bon Air » vocable plus adapté à ce village que celui de « Marathon » dont on affubla St Etienne.
Sur ce plan, St Michel est pauvre, ou a pratiquement tout perdu.
Le château fort est ruiné depuis le XVI e siècle. Sans doute la tour évoquée plus haut a subsisté un certain temps. En tout cas, il ne reste actuellement aucun vestige féodal. Simplement, sur
l’emplacement approximatif, a été érigée, en 1954, une statue à la Vierge, sous le vocable caractéristique de « N.D. des Vents ». C’est donc un monument récent, un
Ex-voto sobre et sans prétention artistique, destiné à entretenir la piété mariale d’une paroisse, restée assez chrétienne.
La première église, vu le patronage de la paroisse, devait remonter à une époque lointaine. L’actuelle, construite sur l’emplacement de l’ancienne, est relativement récente (autour de 1840). Elle
n’a pas d’intérêt architectural. Seule la décoration, pourtant postérieure, elle date de 1912, a un certain caractère : un plafond et une frise de style rococo. C’est une imitation, mais bien
typée, due au pinceau d’un peintre italien, fidèle héritier de cette tradition picturale. Précisément, vient d’être réalisée la réfection intérieure de l’église ; la peinture a été rafraîchie,
tout en respectant le style. Il n’y a pas, ou il n’y a plus de maisons fortes, ou de fermes fortifiées, comme on en trouve à St Etienne, Bressieux, Plan ou la Forteresse. On m’a bien signalé
quelques maisons dites de « Roche Vieille » à l’entrée du village, un peu au dessus de la route principale venant de St Etienne, mais elles ont perdu leur cachet ancien.